Fés
La plus belle et la plus envoûtante médina du Maroc est un labyrinthe de 9.500 rues
et d’un millier d’impasses grouillantes de petits marchands guidant leur âne chargé
de marchandises. Les souks y regorgent de victuailles en tout genre ou abritent divers
corps de métiers, un ancien caravansérail magnifiquement restauré héberge un musée du
Bois où cèdres et arganiers se muent en portes somptueuses, coffres et étagères sculptées.
Le musée des Arts marocains est installé entre Fès el-Bali et Fès el-Jedid. On y trouve une
remarquable collection de poteries en provenance de différentes villes et de différentes époques.
Fès el-Jedid fut fondée au 13e siècle à côté de Fès el-Bali. Elle est surtout remarquable par
l’ancien quartier juif qui offre une architecture totalement différente. Une très belle synagogue,
récemment restaurée et réouverte revit au rythme du culte judaïque.
Fès, cité millénaire, est la première ville orientale au Maroc.
Idris Ier, immigré d'Orient, fonda en 172H/789 J.-C., sur la rive droite de l'oued Fas,
le premier noyau - Madinat Fas -, bourgade berbère à forte empreinte rurale. 20 ans
plus tard, en 193H/809 J.-C., son fils Idris II fonda sur la rive gauche, dans la
partie ouest du site, plus escarpée et riche en eau que la précédente, une seconde
agglomération - al-Aliya (la Haute) - conçue à l'orientale avec son palais et sa qisariya.
Deux faits historiques, l'insurrection du "Faubourg de Cordoue" en 199H/818 JC et une
rébellion kairouanaise allaient être riches de conséquences pour la destinée de Fès.
Avec l'installation de huit cent familles andalouses, la rive droite dénommée alors
'Udwat al-Andalus s'urbanisa sur le mode andalou; ces faubouriens rabatis qui comptaient
des artisans, des petits marchands néo-musulmans et des notables, apportaient "leur
expérience de la vie citadine, leurs techniques ancestrales du jardinage, de la bâtisse et de l'artisanat".
Peu après, dans la ville d' al-Aliya, où dominait une population arabe très diversifiée
quant à ses origines tribales, l'élite citadine composée de nobles, fut renforcée par
l'arrivée de trois cents famille kairouanaises et de nombreux juifs qui firent bientôt
du commerce avec toute l'Afrique du Nord. Cette ville fut appelée 'Udwat al-Qarawiyyin'.
Au Xe siècle, la lutte d'influence politique entre Umayyades d'Espagne et Fatimides
d'Ifriqiya dans le Nord du Maroc est favorable à la commande artistique. L'architecture et
le mobilier révèlent les grandes tendances de l'art marocain: ces dernières puisent presque
davantage aux sources de l'Ifriqiya qu'à celles de l'Andalousie. La très précieuse chaire de
la mosquée des Andalous (fin Xe siècle) dont les techniques et procédés décoratifs ont survécu
dans maintes réalisations ultérieures, témoigne de la maîtrise des sculpteurs, peintres et tourneurs sur bois.
A Fès, capitale spirituelle et du savoir-faire, le nombre des artisans s'élève à plusieurs
dizaines de milliers. En 1923, 162 corporations ont été dénombrées, dont plus de la moitié
opéraient dans le domaine de l'artisanat. Ces corporations, dont la plupart étaient composées
d'artisans, comptaient des commerçants ou étaient des corporations de services (kwadsiya).
Leur présence atteste l'importance de l'artisanat dans l'économie de la médina; d'ailleurs,
maintes chroniques soulignent le rôle économique et politique joué par celles-ci au cours de
l'histoire. L'organisation spatiale de l'artisanat corrobore cette importance: le secteur
artisanal, qu'il s'agisse d'ateliers de fabrication ou de marchés de vente, est regroupé
autour de la Qaraouiyin, principal noyau de la ville ancienne (souks Chemmaîn, Sbitriyn, Seffarin, Nejjarin).